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Les zones d’activités genevoises se réinventent

CCIG
Posté le 23/01/2018
Articles de fond

Un fait rare s’est produit au Grand Conseil genevois le 6 avril dernier : la nouvelle loi sur la Fondation pour les terrains industriels de Genève (FTI) a été adoptée à l’unanimité des députés. Ce consensus fort consacre la mue entamée par la FTI depuis plus de cinq ans, notamment suite à l’adoption de la nouvelle Constitution cantonale introduisant la notion d’écologie industrielle et la mise en œuvre des zones de développement d’activités mixtes (ZDAM). La CCIG est partie prenante de cette évolution, puisque Charles Lassauce, membre de sa Direction, a été nommé vice-président de la Fondation en septembre dernier.

De régisseur à partenaire
Durant des décennies, les zones industrielles du canton se sont régulièrement développées en s’étendant sur de nouvelles parcelles auparavant agricoles. Depuis les années 2000, le paradigme constructif a évolué et la notion de densité des zones à bâtir s’est peu à peu imposée. L’exiguïté du canton, alliée à l’adoption de principes plus restrictifs formalisés dans la loi fédérale sur l’aménagement du territoire (LAT), ont conduit à l’émergence de nouveaux modèles de planification.
Dans ce contexte, le rôle de la FTI, acteur incontournable mais pas unique dans les zones industrielles, a considérablement changé. La Fondation est passée d’une activité de régie à celle de partenaire de l’aménagement de ces zones. Initialement, elle répondait à la mission première de favoriser l’établissement d’entreprises dans les zones industrielles du canton, avec attribution de terrains en droit de superficie et gestion des relations avec les superficiaires pendant la durée de vie du contrat. Elle ne se contente donc plus d’une vision par parcelle, mais élargit son champ d’activité aux secteurs, voire aux zones d’activités complètes. La FTI se réinvente en collaborant tant avec l’Etat qu’avec les acteurs privés pour développer des périmètres intégrant toutes les composantes de l’aménagement du territoire.

La densité comme moteur
Cette évolution répond à l’accroissement des missions confiées à la FTI, notamment la nécessaire rationalisation de la gestion des espaces. D’un développement traditionnellement horizontal des projets (avec des bâtiments industriels relativement simples, mono-utilisateurs et de faible hauteur), on se dirige vers des immeubles industriels plus complexes et verticaux, qui offrent plus de surface pour un même périmètre au sol et sont parfois occupés par plusieurs entreprises.
Les défis à relever par la mise en œuvre de la densité ne sont pas anodins. Les processus de production de certaines entreprises doivent être repensés pour s’adapter à des espaces disponibles plus restreints et parfois à l’étage. Il n’est en effet plus envisageable de garantir à tous des accès de plain-pied. Cela implique de trouver des solutions parfois innovantes, qui prennent en compte l’évolution technologique rapide et la digitalisation, et remet en question la pertinence des modèles d’affaires traditionnels.

Si les bâtiments changent, il convient également de revoir l’environnement des zones. La densité des surfaces s’accompagne d’une plus grande fréquentation des périmètres et nécessite des aménagements adéquats. La mutualisation des parkings et les plans de mobilité font à présent partie intégrante des réflexions à mener lors du développement d’un projet ou de la mutation d’une zone. A l’instar des quartiers urbains, des activités de services doivent pouvoir être proposées aux travailleurs du secteur, pour faire des zones industrielles de véritables pôles attractifs et limiter les déplacements inutiles en périphérie.

Ancrage constitutionnel
« L’Etat respecte les principes de l’écologie industrielle » : l’article 161 de la Constitution genevoise adoptée en 2012 introduit une nouvelle manière de concevoir le développement industriel. Par cette disposition, le législateur entend promouvoir une approche globale du système permettant de limiter les impacts de l’industrie sur l’environnement. Le tissu industriel doit être compatible avec les écosystèmes naturels.

Pour respecter ce mandat constitutionnel, il importe de mettre en relation les différents acteurs pour élaborer une approche globale, compatible avec l’objectif de limiter l’impact environnemental. Les écoParcs industriels sont en train de se développer sur le territoire genevois, sous l’impulsion de la FTI. Il s’agit d’un concept de gestion participative, avec les industriels du site, permettant de favoriser des solutions collaboratives et de mise en réseau. Une gestion concertée des réseaux de chauffage et de refroidissement ou la mutualisation des déchets sont des réponses concrètes à la problématique de la limitation des impacts environnementaux.

Et la suite ?

Malgré ce menu copieux, dessert et mignardises sont encore prévus ! Depuis 2013, certaines zones industrielles peuvent accueillir une mixité entre activités secondaires (au minimum 60%) et tertiaires. Les règles du jeu, notamment territoriales, financières et juridiques, sont à inventer pour créer un environnement stable, transparent et équitable pour tous les acteurs. Ces précautions sont d’autant plus nécessaires et actuelles que l’intérêt pour les terrains en zone d’activité va grandissant depuis quelques années auprès des acteurs et des développeurs immobiliers.

Il conviendra également de définir les types d’activités envisageables pour chaque zone. Certaines doivent disposer d’un accès ferroviaire, d’autres peuvent se développer verticalement et d’autres enfin nécessitent des zones peu denses pour entreposer du matériel. C’est donc à un fin quadrillage des périmètres d’activités que devra procéder la FTI pour cartographier les lieux d’accueil potentiel des diverses entreprises. L’objectif étant d’assurer sa mission de veiller « à satisfaire les besoins de toutes les catégories d’entreprises de manière équilibrée ».

Enfin, il n’est pas envisageable d’aborder la question des zones industrielles sans évoquer la mutation de la plus importante d’entre elles, Praille-Acacias-Vernets (PAV). Près de 12 ans après l’élaboration d’une image directrice du quartier, le PAV reste au centre des préoccupations urbanistiques de Genève. Loin d’être une friche, il demande toutefois encore un important travail de relocalisation des entreprises, en son sein ou dans d’autres zones. Comme pour boucler la boucle, sa réalisation nécessitera toutes les facultés offertes par le renouveau des zones d’activité. La FTI sera, à ce titre, un acteur majeur et la CCIG s’assurera que les entreprises genevoises trouvent les appuis nécessaires à leur développement.


L’expérience d’aménagement d’un grand groupe

En plus d’être membre du Conseil de la CCIG, Bernard Chauvet est directeur général de VCS SA. Il nous parle de son expérience en conception, construction et exploitation des infrastructures modernes, en respect du développement durable. Interview.

Quels sont à vos yeux les principaux enjeux des futures zones industrielles ?

J’en vois surtout deux : la rationalisation des surfaces utilisées et la mutualisation des services interentreprises. Dans le premier cas, la digitalisation et la miniaturisation des outils de production contribuent à diminuer les besoins en surface utile. Le dialogue avec les entreprises permet de travailler sur une rationalisation de leurs besoins en surface et une réduction de leurs coûts immobiliers. Parfois, un rapprochement entre différents métiers permet de penser autrement les constructions et de réduire les emprises au sol des bâtiments : les industries lourdes et les artisans avec de gros besoins de stockage et d’ateliers au rez-de-chaussée, les autres artisans au premier étage et les entreprises du tertiaire dans les étages supérieurs. Dans le second cas, il s’agit de repenser les services aux entreprises et leurs collaborateurs en les mutualisant dans une zone : parking, restauration, stockage, énergie, etc. Une mutualisation structurée et intelligente permet de gagner en surface et en coûts d’exploitation.

Les entreprises comprennent-elles bien ce changement de paradigme ?

Au départ c’est difficile, car cela remet en cause la production et les habitudes. Mais quand on réalise les gains potentiels de productivité et d’argent à long terme, un dialogue s’instaure rapidement et les entreprises deviennent proactives.

Les zones industrielles genevoises vont donc beaucoup muter ?
Oui, sans aucun doute. La rationalisation des systèmes de production, la mixité industrielle et le besoin d’image poussent les entreprises vers une refonte de leurs moyens de production en faveur de la mutualisation et de l’architecture. Tout le monde va en profiter.

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